Comment se noue le transfert ? Les entretiens préliminaires
Le séminaire d’étude et de recherche de la Section Clinique de Rennes, animé par Caroline Doucet, Alice Delarue et Jean Luc Monnier
Les jeudis 18 novembre 2021 ; 9 décembre 2021 ; 6 janvier 2022 ; 3 février 2022 ; 10 mars 2022 ; 12 mai 2022 ; 16 juin 2022
Dans un texte de 1913, Freud essaie de définir les règles s’appliquant au début du traitement. Parmi elles, Freud indique qu’il a pris l’habitude de « pratiquer d’abord un traitement d’essai d’une à deux semaines, « on se borne de cette façon, à effectuer un sondage permettant de mieux connaître le cas et de décider s’il se prête ou non à une analyse ». Il précise : « Cet essai préliminaire constitue pourtant déjà le début d’une analyse et doit se conformer aux règles qui la régissent [1] ». Il s’agit de « laisser surtout parler le patient sans commenter ses dires plus qu’il n’est absolument nécessaire à la poursuite de son récit [2] ». Ce court traitement doit faciliter le diagnostic différentiel pas toujours facile à établir, précise-t-il.
C’est en 1971, assez tardivement dans son enseignement, que Lacan soulignera la fonction essentielle des entretiens préliminaires. « Il n’y a pas d’entrée possible en analyse sans entretiens préliminaires [3] ». Si le terme d’entretien revêt une signification différente de celui de consultation ou d’examen qui comportent une dimension médicale, celui de préliminaire laisse entendre qu’un seuil est à franchir, celui du transfert. Sans transfert pas d’analyse possible. Or rien ne le garantit d’avance. Qu’est-ce qui permet l’installation du transfert ?
Ce qui compte, indique Lacan, quand quelqu’un vient le voir pour la première fois, « c’est la confrontation de corps ». C’est de là que ça part et qui fait « qu’à partir du moment où on entre dans le discours analytique, on n’en sortira plus [4] ». Qu’est-ce qui signe l’entrée dans le discours analytique ? Lacan donne une autre indication précieuse : « Il faut laisser les gens parler quand ils viennent nous demander quelque chose [5] », écrit-il, indiquant que dès que l’on parle on demande. Ce qui intéresse Lacan ce n’est pas le contenu de la demande mais ce qui échappe totalement au sujet et en particulier ce qui pousse à demander.
Dès lors, où trouver les indications nécessaires au début du traitement et à ses suites ? Les symptômes, les contenus de la demande, l’entrée en fonction du supposé savoir ou du supposé s’intéresser, etc. sont autant de points de repères. Mais les travaux du cercle viseront à établir plus précisément les éléments d’appréciation qui traduisent « la prise du symptôme dans le transfert [6] ». Nous verrons que le désir et l’acte de l’analyste sont les opérateurs décisifs pour enclencher le processus analytique.
[1] Freud S., « Le début du traitement », La technique psychanalytique, Paris, PUF, 1985, p. 81.
[2] Ibid., p. 81.
[3] Lacan J., « Le savoir du psychanalyste », Séminaire du 2 décembre 1971, inédit.
[4] Lacan, J., Le Séminaire, livre xix, … Ou pire, Paris, Seuil, leçon du 21 juin 1972.
[5] Lacan, J., « Excursus », Lacan in Italia, 1978, p. 78-97.
[6] Wachsberger H., « Fonction des entretiens préliminaires », Ornicar ?, n° 33, 1985, p. 16.